25 / "Mes copines de chimio"
- rvtaccount
- 18 oct. 2020
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 25 oct. 2020
Je ne pouvais pas ne pas écrire sur elles. Mes copines de chimio, comme j'ai souvent habitude de les nommer pour parler d'elles. Ces filles qui vivent le même quotidien et la même galère que moi. Je te présente Carine et Adeline.
Nos échanges n'ont pas été immenses, nous ne nous sommes pas vues un nombre incroyable de fois et pourtant elles ont toutes les deux une place importante dans ma vie. La maladie nous a rapprochés, avec l'aide d'Audrey, notre infirmière coordinatrice qui d'une chambre à l'autre parlait de nous et nous a fait nous rencontrer.
Tout d'abord, Carine, que je rencontre lors de ma première cure de chimio. Elle a un temps d'avance sur moi et en est déjà à sa 4 ème cure ! C'est une jeune libanaise de 24 ans que je découvre, pétillante et pleine d'optimisme ! Elle a le même cancer que moi, à un organe près. A défaut d'avoir un sarcome à l'intestin, Carine a un sarcome au coeur.
Nous suivons la même chimio et elle me donne rapidement plein de petits conseils pour la suite. Nos chemins se séparent lorsqu'elle finit sa dernière cure mais nous gardons contact et Carine m'annonce que ses résultats sont bons et qu'une greffe l'attend bientôt ! J'éprouve tellement de joie pour elle à ce moment là et je fantasme aussi un peu secrètement de pouvoir dire un jour des paroles aussi positives.
Sur ces mots, je te laisse découvrir son histoire :
"J’habite en France depuis un an seulement, avec ma colocataire libanaise. En plein confinement, j’ai été hospitalisée et opérée en urgence pour ce qu’on m’avait dit être une "masse" dans mon coeur. Elle a détruit une de mes valves et l’empêchait de fonctionner. Une semaine plus tard, on m’annonce que cette masse était cancéreuse, un sarcome (que j’aime appeler un monstre) qui est apparu dans ma vie sans aucune raison particulière. On m’a dit qu’il en restait "quelques bouts" dans le cœur et que j’avais besoin d’une chimiothérapie. C’était particulièrement dur à apprendre loin de ma famille, dans un pays étranger, uniquement accompagnée de ma colocataire (qui m’a sauvé la vie en appelant le SAMU et qui, d’ailleurs, n’a jamais arrêté de m’encourager et de me donner confiance en moi pendant le reste du parcours).
Mes parents ont tout fait pour venir du Liban en plein milieu du confinement, et m’accompagnent toujours, vers la fin de mon parcours en combattant le monstre qui a bouleversé toutes nos vies.
La perte des cheveux et les effets des chimios sur ma peau sont apparus, j’ai senti que je perdais mon côté féminin et, évidemment, je détestais mon apparence. J’ai appris à vivre avec et j’étais motivée à tuer le monstre et ne plus jamais subir quelque chose de pareil. Je me suis concentrée sur mes amis, sur la cuisine, sur les gens qui m’entourent et que j’aime.
J’ai rencontré Amélie à l’hôpital pendant ma quatrième chimio et j’ai appris qu’elle combattait un monstre comme le mien, mais pas dans son cœur. Bien que c’était triste, je me suis identifiée à elle et j’ai senti qu’il y avait simplement quelqu’un qui me comprend, ou au moins qui me comprendrait plus tard, puisqu’elle venait de commencer sa première séance de chimiothérapie.
On se voyait toutes les séances, on papotait un peu, jusqu’à la fin de mes traitements. On prenait des nouvelles l’une de l’autre quand on pouvait, avec beaucoup d’encouragements et de mots tendres. Je l’ai trouvé si courageuse, en écrivant à propos de sa maladie et de son parcours sur son blog, une chose que je n’aurais jamais osé faire.
Après mes traitements je devais choisir entre une radiothérapie et une transplantation cardiaque. J’ai fini par choisir la transplantation pour me débarrasser une fois pour toute du monstre qui avait débarqué dans ma vie. Trois semaines après la greffe, je viens d’apprendre qu’il restait des cellules cancéreuses dans mon ancien cœur, qu’il était toujours malade. Aujourd'hui je n’ai rien d’urgent à faire sauf un suivi régulier. Ça a renforcé en moi la décision que j’ai prise.
Amélie m’a demandé de décrire un peu mon parcours, et je trouve que son timing n’aurait pas pu être mieux.
Je n’aurais pas pu arriver vers la fin et chasser le monstre sans l’encouragement et l’amour de ma famille, de nos amis, des gens comme Amélie qui comprenaient, et des gens qui ne comprenaient pas forcément mais qui voulaient comprendre et être là."
Bon ... je te laisse quelques secondes avant de poursuivre et imaginer un peu la dose de courage qu'il faut avoir pour traverser une expérience pareil ! Je suis à chaque fois impressionner par le parcours de chacune des personnes que j'ai croisé à l'hôpital !
Alors voici une autre personne bien courageuse elle aussi: Adeline.
Je la rencontre lors de ma quatrième cure de chimio. (Oui, comme lorsque je rencontre Carine, elle aussi en quatrième cure au moment de notre rencontre... J'aime me dire que c'est un signe, un peu comme si nous nous tenions la main à tour de rôle ! Des petits anges gardiens.) Adeline n'a pas le même cancer que moi mais nous partageons des moments de discussion à chacune de nos cures et elle me sauvera la vie plus d'une fois en partageant avec moi des repas bien meilleurs que ceux de l'hôpital ! Nous avons le même âge et je me retrouve en elle plus qu'en n'importe qui d'autre sur cette planète actuellement (excepter Carine aha). Nous avons, à quelques détails près, les mêmes préoccupations concernant notre avenir et j'aime le fait de pouvoir partager avec elle mes états d'âmes, sans jamais ressentir aucune pudeur.
Voici son parcours :
" Je m'appelle Adeline, j'ai 23 ans. Ça faisait quelques mois que je m'inquiétais en voyant mon ventre grossir. Comme d'habitude, je me dis que ce n'est rien. Début juin, je commence à vraiment m'inquiéter, mais je préfère attendre de passer mon concours de professeur des écoles pour aller consulter. Dans ma tête, je suis enceinte et faire un test de grossesse me terrifie. Le lendemain du concours, je parle de mes inquiétudes à ma sœur. Elle m'emmène directement faire un test. Bingo, positif. J'ai l'impression que le monde s'écroule autour de moi. Il s'écroulera vraiment quelques jours plus tard, quand on m'annonça que non, je n'étais pas enceinte, mais que j'avais une masse dans le ventre. Après une batterie d'examens, direction Lyon pour me faire opérer, ce sera le 15 juillet. Le soir de l'opération, la chirurgienne m'annonce que dans 90% des cas, j'ai un cancer et qu'il faudra que je fasse de la chimio sur plusieurs mois. Une semaine après l'opération, je commence la chimio.
Quelques semaines plus tard, l'infirmière me dit qu'il y a deux filles de mon âge dans les chambres d'à côté. Je vais alors rencontrer Amélie. On s'est raconté chacune notre parcours et c'était assez "rassurant" de se dire qu'on était pas toute seule dans la même galère. Pour une fois quelqu'un pouvait vraiment comprendre par quoi on passait pendant la chimio, même si on a pas le même cancer et que chacun de notre parcours est différent. Je sais maintenant qu'on pourra discuter ensemble et que ces moments à l'hôpital seront plus agréables. En rentrant à la maison je parle à tout le monde d'Amélie, j'ai l'impression d'avoir trouvé une alliée dans ce combat.
J'ai aussi croisé Carine mais seulement 5min, elle était venue nous annoncer qu'elle avait trouvé un donneur et qu'elle allait se faire bientôt greffer du cœur. Je ne l'avais jamais vu mais j'étais tellement contente pour elle, ça fait plaisir ce genre de bonnes nouvelles à l'hôpital."
Je suis très fière d'avoir ce genre de personne dans ma vie, d'avoir pu être à leur côté dans leur combat et qu'elle soit auprès de moi dans le mien. Comme l'a dit Adeline, c'est extrêmement rassurant de pouvoir se confier à quelqu'un qui comprend entièrement ce que l'on vit. La peur de la mort, l'incertitude de l'avenir, les remises en questions professionnelles... autant de sujets difficiles à aborder mais tellement simples à comprendre lorsqu'on parle de ça entre nous.
Alors voilà, je souhaitais écrire sur ces belles guerrières, partager leur histoire et montrer leur courage.
Merci la vie de les avoir mis sur mon chemin !
תגובות